Civ. 2e, 29 août 2019, F-P+B+I, n° 18-14.768

Par un arrêt rendu le 29 août dernier, la Cour de cassation a procédé à un important revirement de jurisprudence en matière assurantielle. Désormais, la nullité du contrat d’assurance prévue à l’article L. 113-8 du code des assurances, en présence d’une fausse déclaration intentionnelle du risque par l’assuré, est inopposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit.

Dans l’affaire à l’origine de cette évolution prétorienne, le conducteur d’une motocyclette avait été victime d’un accident de la circulation. Le conducteur habituel et propriétaire du véhicule automobile impliqué dans le choc l’avait fait assurer par un ami, déclaré comme conducteur principal. La victime étant décédée des suites de ses blessures, un tribunal correctionnel a déclaré le propriétaire coupable d’homicide involontaire. Les ayants droit de la victime ont ensuite assigné ce dernier et son assureur en indemnisation de leurs préjudices, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie. L’assureur a quant à lui assigné en intervention forcée le souscripteur du contrat d’assurance du véhicule conduit par l’auteur de l’accident et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO). Par arrêt déclaré opposable au FGAO, la cour d’appel de Grenoble a annulé le contrat d’assurance souscrit et débouté les ayants droit de la victime des demandes qu’ils avaient formées à l’encontre de l’assureur.

Au visa de l’article L. 113-8 du code des assurances, ensemble l’article R. 211-13 du même code, interprétés à la lumière de la directive 72/166/CEE du Conseil du 24 avril 1972 (art. 3, §1) et de la deuxième directive 84/5/CEE du Conseil du 30 décembre 1983 (art. 2, § 1), et de la directive n° 2009/103 du Conseil du 16 septembre 2009 (art. 3 et 13), la haute juridiction censure cette solution en ce qu’elle rejette la demande du FGAO tendant à voir dire que l’assureur sera tenu de garantir les conséquences dommageables de l’accident. La deuxième chambre civile s’aligne sur la position de la Cour de justice de l’Union européenne, selon qui les textes de 1972 et 1983 « doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui aurait pour effet que soit opposable aux tiers victimes, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, la nullité d’un contrat d’assurance de responsabilité civile automobile résultant de fausses déclarations initiales du preneur d’assurance en ce qui concerne l’identité du propriétaire et du conducteur habituel du véhicule concerné ou de la circonstance que la personne pour laquelle ou au nom de laquelle ce contrat d’assurance est conclu n’avait pas d’intérêt économique à la conclusion dudit contrat ». La Cour de cassation en déduit « qu’interprétée à la lumière des dispositions des directives susvisées, la nullité édictée par l’article L. 113-8 du code des assurances n’est pas opposable aux victimes d’un accident de la circulation ou à leurs ayants droit ».

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