Civ. 2e, 7 févr. 2019, F-P+B+I, n° 17-27.223

En matière d’assurance-vie, l’exercice, par le preneur, de la faculté prorogée de renonciation en l’absence de respect, par l’assureur, du formalisme informatif légal peut dégénérer en abus. La Cour de cassation l’a confirmé récemment dans une espèce impliquant une personne qui avait souscrit, le 28 novembre 2003, auprès d’une société d’assurances, aux droits de laquelle se trouvait une autre entreprise d’assurances, un contrat d’assurance sur la vie prenant effet au 1er janvier 2004. L’assuré y avait investi la somme totale de 12 000 €. Estimant ne pas avoir reçu une information précontractuelle conforme aux exigences légales, l’assuré exerça son droit de renonciation le 9 juillet 2012. L’assureur n’y donna pas suite et fut assigné par l’assuré en remboursement des primes versées et en paiement de dommages-intérêts. Condamné en appel, l’assureur se pourvut en cassation.

C’est tout d’abord l’occasion pour la haute juridiction de réaffirmer que l’article L. 132-5-1 du code des assurances, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que le défaut de remise des documents et informations qu’il énumère entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation jusqu’au trentième jour suivant la remise effective de ces documents. Or en l’espèce, la note d’information dont se prévalait l’assureur ne pouvait être considérée comme ayant été remise à l’intéressé. En effet, si une lettre recommandée avait bien été envoyée à l’adresse de l’assuré, la signature portée sur l’avis de réception du 2 août 2007 n’était manifestement pas la sienne mais celle d’une personne non identifiée. Le délai de trente jours n’avait donc pas couru.

La Cour rappelle ensuite le principe selon lequel si la faculté prorogée de renonciation prévue par ce même article revêt un caractère discrétionnaire pour le preneur d’assurance, son exercice peut dégénérer en abus. Précisément, les juges d’appel auraient ici dû « rechercher à la date d’exercice de la faculté de renonciation, au regard de la situation concrète de [l’assuré], de sa qualité d’assuré averti ou profane et des informations dont il disposait réellement, quelle était la finalité de l’exercice de son droit de renonciation et s’il n’en résultait pas l’existence d’un abus de droit ». N’ayant pas procédé à cette recherche, ils ont privé leur décision de base légale.

Auteur : Éditions Dalloz – Tous droits réservés.