Civ. 2e, 16 sept. 2021, n° 19-25.678

« L’assureur ne répond pas des pertes et dommages résultant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré », énonce l’article L. 113-1, alinéa 2, du code des assurances. Et par l’arrêt rapporté, la Cour de cassation confirme qu’elle en retient une conception stricte (ou objective) : la faute intentionnelle selon le juge pénal n’est pas assimilable à la faute intentionnelle au sens de l’assurance et retenue par un juge judiciaire. Par conséquent, seul le dommage recherché par l’assuré (condamné pénalement) est exclu de la garantie due par l’assureur, en présence d’une faute intentionnelle impliquant la volonté de créer le dommage tel qu’il est survenu.

En l’occurrence, à la suite d’un incendie volontaire, le propriétaire d’un immeuble avait subi la destruction de son bien. Un jugement du tribunal correctionnel a déclaré l’auteur des dommages coupable de l’infraction de dégradation ou détérioration du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes, et l’a condamné à une peine d’emprisonnement. Statuant sur les intérêts civils, le tribunal correctionnel a par ailleurs condamné l’incendiaire à réparer le préjudice matériel subi par le propriétaire. Ce dernier a perçu de son assureur « multirisque habitation », la société Gan assurances, une somme au titre de l’indemnité immédiate et une partie de l’indemnité différée. La société Gan assurances, exerçant son recours subrogatoire, a ensuite réclamé à l’assureur de l’auteur des dommages, la société Aviva assurances, le règlement de la somme payée, à titre amiable, à son assuré. La société Aviva assurances lui a opposé un refus, au regard de l’exclusion de garantie prévue au contrat « multirisque habitation ». Le propriétaire a alors assigné la société Aviva assurances afin que soit retenue la garantie de cette dernière, en qualité d’assureur « responsabilité civile » de l’auteur des dommages, et qu’elle soit condamnée à l’indemniser des dommages subis du fait de son assuré. La société Gan assurances est intervenue volontairement à l’instance aux fins de condamnation de la société Aviva assurances à lui payer les sommes versées à son assuré.

Le litige ayant finalement été porté devant la Cour de cassation, cette dernière rappelle le principe selon lequel « la faute intentionnelle implique la volonté de créer le dommage tel qu’il est survenu et n’exclut de la garantie due par l’assureur à l’assuré, condamné pénalement, que le dommage que cet assuré a recherché en commettant l’infraction ». Il en résulte que « pour exclure sa garantie en se fondant sur une clause d’exclusion visant les dommages causés ou provoqués intentionnellement par l’assuré, l’assureur doit prouver que l’assuré a eu la volonté de créer le dommage tel qu’il est survenu ». Que faut-il en conclure ? Qu’en l’espèce, la qualification de faute intentionnelle ne pouvait être retenue pour débouter la victime de ses demandes alors que l’assuré, qui avait agi dans le but de détruire le bien de son ex-compagne, n’avait pas eu la volonté de créer le dommage tel qu’il était survenu.

Ajoutons que bien que le contrat litigieux intègre une clause d’exclusion de garantie pour faute de l’assuré distincte de l’exclusion légale posée par l’article L. 113-1 du code des assurances, l’analyse retenue par la haute juridiction conduit, en pratique, à dénuer une telle clause de toute utilité. La définition de la faute intentionnelle, au sens de la clause contractuelle, est en effet la même que celle de la faute intentionnelle au sens de l’article L. 113-1.

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