Civ. 3e, 9 avr. 2014, FS-P+B, n° 13-15.555

Cette décision de la troisième chambre civile, du 9 avril 2014, a le mérite d’apporter d’intéressantes précisions sur l’articulation des recours qu’exerceront les uns envers les autres les différents assureurs lors d’un chantier et à l’occasion de l’apparition de désordres. En effet, une cour d’appel est approuvée pour avoir dégagé deux règles complémentaires. Premièrement, les assureurs en responsabilité de l’architecte et de l’entrepreneur, auxquels incombait la charge finale de la réparation des désordres relevant de l’article 1792 du code civil, devaient prendre toutes les mesures utiles pour éviter l’aggravation du sinistre. Deuxièmement, ils ne pouvaient pas se prévaloir des fautes de l’assureur dommages-ouvrage qui auraient pu concourir à l’aggravation des désordres. En d’autres termes, il ne leur est pas possible de « se défausser » sur l’assureur dommages-ouvrage en excipant des fautes éventuelles que ce dernier aurait pu commettre.

En l’espèce, les difficultés étaient nées de la réalisation d’un lot étanchéité. Les deux assureurs en responsabilité de l’entrepreneur et de l’architecte prétendaient que l’assureur dommages-ouvrage avait commis une faute : il aurait effectué une proposition d’indemnisation insuffisante, ce qui avait, selon eux, entraîné une aggravation des désordres. Toute la question était donc de savoir si les deux assureurs pouvaient se prévaloir de cette faute commise par l’assureur dommages-ouvrage et obtenir ainsi, sur le fondement délictuel, grâce à la prétendue mauvaise exécution d’un contrat auquel ils n’étaient pas partie, un éventuel allègement du poids de leur dette.

La réponse est négative pour la Cour de cassation, qui s’appuie sur une dimension finaliste de l’assurance. En effet, selon la Haute juridiction, comme la charge finale de la réparation des désordres décennaux incombait aux assureurs en responsabilité de l’architecte et de l’entrepreneur, ceux-ci devaient prendre toutes les mesures utiles pour éviter l’aggravation du sinistre et ne pouvaient se prévaloir des fautes de l’assureur dommages-ouvrage qui auraient pu concourir à l’aggravation des désordres.

Cette solution, conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour, peut au demeurant être comprise eu égard à la finalité de l’assurance dommages-ouvrage, à savoir préfinancer les travaux sans pour autant être définitivement tenue d’assumer la charge définitive de la dette. Se pose alors la question de savoir quelles sont les mesures que pourrait prendre l’assureur en responsabilité décennale pour éviter l’aggravation du sinistre. Et l’on songera au financement des réparations. Voilà encore le meilleur moyen pour minorer son préjudice.

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