Crim. 2 déc. 2014, FS-P+B, n° 14-80.933

En l’espèce, un homme était victime, en qualité de conducteur, d’un premier accident de la circulation, le 27 juillet 2005. Le 6 mai 2006, il subissait un second accident, en qualité de passager. Les deux véhicules faisaient l’objet du même contrat d’assurance signé par la mère de la victime pour assurer son propre véhicule. Ce contrat avait fait l’objet d’avenants successifs, les 2 juillet 2005 et 5 avril 2006.

Lors de l’action en réparation des conséquences dommageables du second accident, le tribunal correctionnel d’Aurillac avait fait droit à la demande de nullité du contrat d’assurance, motif pris de la fausse déclaration intentionnelle de l’assurée faite lors de l’avenant du 5 avril 2006 (et portant, en l’espèce, sur l’identité du conducteur habituel du véhicule). Lors de l’action en réparation des conséquences dommageables du premier accident, la société d’assurances sollicitait sa mise hors de cause en invoquant la nullité du contrat d’assurance précédemment constatée par le tribunal correctionnel.

Les juges de première instance avaient fait droit à cette demande mais leur décision fut infirmée par les juges d’appel au motif notamment que la nullité efface le contrat rétroactivement au jour où la fausse déclaration a été faite. La société d’assurances, auteur du pourvoi, faisait valoir que la décision des juges d’appel méconnaissait l’autorité de chose jugée attachée au premier jugement du tribunal correctionnel d’Aurillac. Elle indiquait également que la nullité affectait l’entier contrat en raison de l’unicité du contrat d’assurance. Enfin, elle faisait valoir que la loi ne prévoyait nullement une limitation temporelle à la rétroactivité.

La Cour de cassation ne donne néanmoins pas suite à cette argumentation : elle confirme la décision des juges d’appel en indiquant dans son attendu final que « la nullité du contrat d’assurance n’a pris effet qu’à la date de la fausse déclaration intentionnelle qu’elle sanctionne ».

Cette décision apparaît parfaitement équitable et cohérente avec l’esprit du texte de l’article L. 113-8 du code des assurances qui dispose que « […] le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre ». En effet, l’objet du risque n’était pas changé avant la souscription de l’avenant puisqu’il n’y avait pas alors de fausse déclaration. Telle était d’ailleurs la position de la doctrine qui considérait que, si le contrat était annulé pour mauvaise foi au moment de la déclaration initiale des risques, il convenait de faire remonter la nullité jusqu’à cette date. En revanche, si le contrat était annulé pour mauvaise foi lors d’une déclaration des risques en cours du contrat, la nullité ne pouvait remonter que jusqu’à cette période. Si la décision est donc cohérente avec l’esprit du texte, force est néanmoins de constater qu’elle est moins intelligible avec le droit commun de la nullité qui implique l’anéantissement total du contrat. Il est, en effet, difficile de considérer que l’avenant est un nouveau contrat puisqu’il fait corps avec la police d’assurance. Peut-être faut-il, à l’instar de la cour d’appel dans ce dossier, reconnaître que la nullité édictée par l’article L. 113-8 du code des assurances est d’une nature spéciale. D’ailleurs, alors qu’en droit commun de la nullité, l’intégralité des primes devrait être reversée à l’assuré, tel n’est pas le cas dans l’hypothèse d’une fausse déclaration intentionnelle en application de l’alinéa 2 de l’article L. 113-8 précité.

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