Civ. 2e, 2 juill. 2020, nos 19-11.417 et 19-13.636

Par un arrêt rendu le 2 juillet 2020, la Cour de cassation précise qu’il résulte des articles 2363 du code civil et L. 132-10 du code des assurances que le créancier bénéficiaire d’un nantissement de contrat d’assurance-vie rachetable, qui peut provoquer le rachat, dispose d’un droit exclusif au paiement de la valeur de rachat, excluant ainsi tout concours avec les autres créanciers du souscripteur, même privilégiés.

Pour rappel, l’article L. 132-10 du code des assurances dispose que « la police d’assurance peut être donnée en nantissement soit par avenant, soit par acte soumis aux formalités des articles 2355 à 2366 du code civil. / Quand l’acceptation du bénéficiaire est antérieure au nantissement, ce dernier est subordonné à l’accord du bénéficiaire. / Quand l’acceptation du bénéficiaire est postérieure au nantissement, celle-ci est sans effet à l’égard des droits du créancier nanti. / Sauf clause contraire, le créancier nanti peut provoquer le rachat nonobstant l’acceptation du bénéficiaire ».

Quant à l’article 2363 du code civil, il prévoit qu’« après notification, seul le créancier nanti reçoit valablement paiement de la créance donnée en nantissement tant en capital qu’en intérêts. Chacun des créanciers, les autres dûment appelés, peut en poursuivre l’exécution ».

En l’espèce, le comptable responsable du service des impôts des particuliers d’un arrondissement de Paris, agissant sur le fondement de titres exécutoires délivrés à l’encontre d’un contribuable également souscripteur d’une assurance-vie, avait notifié, le 31 août 2016, entre les mains de la société d’assurance un avis à tiers détenteur portant notamment sur un contrat rachetable n° 305536 souscrit par le débiteur. L’assureur ayant indiqué qu’il ne pouvait procéder à aucun paiement au titre de ce contrat, le comptable public a assigné l’entreprise d’assurance devant un juge de l’exécution en paiement des sommes, objet de l’avis à tiers détenteur. L’assureur a alors fait valoir que le contrat en cause avait fait l’objet d’un nantissement, le 2 décembre 2012, au profit d’une banque.

Les juges du fond ont accueilli la demande du comptable public et condamné la société d’assurance-vie à payer au service des impôts l’intégralité des fonds versés par le souscripteur sur le contrat n° 305536 dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l’avis à tiers détenteur. Selon eux, « s’agissant des contributions directes, le privilège du Trésor, bien que général, doit, en raison de son rang, s’exercer avant tout autre et primer le nantissement de la créance du souscripteur sur l’assureur au profit de la banque, quelle que soit la date à laquelle ce dernier a été constitué et que le comptable peut exercer immédiatement la faculté de rachat, aux lieu et place de la banque ou du souscripteur ». Cette décision est censurée par la Cour de cassation.

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