Com. 13 nov. 2012, F-P+B, n° 02-10.220

Une banque ayant ainsi fait l’avance du montant d’un chèque sous réserve de son encaissement, elle est fondée à exercer un recours contre sa cliente par voie de contre-passation, sans avoir à recourir contre le tireur du chèque.

Il arrive que le chèque soit émis à l’ordre non pas du véritable créancier mais à celui de sa banque. Que se passe-t-il en ce cas lorsque le chèque n’est pas provisionné. La banque qui a porté le montant du chèque au crédit du compte de son client peut-elle le contrepasser  ou doit-elle impérativement exercer ses recours cambiaires contre le tireur en tant que porteur et bénéficiaire du chèque ?

Ici, une caution, assignée en paiement, recherchait la responsabilité de la banque pour avoir, à tort, contrepassé une écriture sur le compte du débiteur principal. Un chèque, émis à l’ordre de la banque par une société civile immobilière (SCI) en paiement de travaux exécutés par une société, avait été porté au crédit de cette dernière. Du point de vue de la caution, parce qu’il avait été émis à l’ordre de la banque, le chèque n’avait pu être escompté, ni au profit de la société (endos translatif), ni remis à la banque pour encaissement pour le compte de cette société (endos de procuration). Or, l’on sait qu’en l’absence de faute de sa part, la banque a toujours, et quelle que soit la nature de l’endossement lui ayant bénéficié, le droit de se faire rembourser par le bénéficiaire de chèques, qui se sont révélés ensuite sans provision, le montant des avances qu’elle lui avait accordées lors de leur remise dans l’attente de leur encaissement. En d’autres termes, qu’il y ait escompte de chèque ou mandat pour en obtenir le paiement, la banque peut, dans les deux cas, se faire rembourser ce qu’elle a avancé, c’est-à-dire contre-passer l’écriture initiale par laquelle elle crédite le compte du remettant.

En quelle qualité, le banquier avait-il agi en portant un chèque émis à son ordre sur le compte d’une société cliente ?

La Cour de cassation observe, d’abord, que la cour d’appel ne s’était pas contredite en retenant, d’un côté, que le chèque litigieux avait été émis à l’ordre de la caisse par la SCI en paiement de travaux exécutés par la société, et, de l’autre, qu’il avait été porté par la caisse au crédit du compte de la société bénéficiaire, dès lors qu’en utilisant ce terme, elle a nécessairement fait référence au rapport fondamental. C’est en effet ce rapport fondamental qui explique l’émission du chèque et sa véritable destination. La Cour poursuit en relevant que, en réalité, la caisse avait fait l’avance du montant du chèque sous réserve de son encaissement. Enfin, elle relève que ce qui était contesté, c’était la contre-passation et non l’accord de la société pour faire émettre à l’ordre de la banque le chèque émis en paiement de sa créance de travaux - ce qui peut effectivement interpeller.

La contre-passation n’est donc pas remise en question.

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