Com. 6 janv. 2015, F-P+B, n° 13-21.305

Dans un arrêt du 6 janvier 2015, la chambre commerciale admet pour la première fois la présomption réfragable de la responsabilité solidaire d’une société-mère provenant du comportement anticoncurrentiel de sa filiale. 

Auparavant, la Cour de justice de l’Union européenne avait jugé, dans sa décision Akzo Nobel du 10 septembre 2009, qu’une société-mère est présumée exercer une influence déterminante sur sa filiale dès lors qu’elle détient la totalité ou la quasi-totalité de son capital. Par conséquent, en vertu d’une présomption réfragable, la société-mère est, selon la Cour, tenue solidairement du paiement des sanctions pécuniaires prononcées à l’encontre de la filiale ayant contrevenu au droit européen de la concurrence. Elle ne peut donc se soustraire à sa responsabilité en démontrant son absence de comportement frauduleux.

Lui emboîtant le pas, l’Autorité française de la concurrence s’est prononcée, le 9 décembre 2009, en faveur de la même présomption réfragable concernant la société Orange Caraïbe, détenue en totalité par Orange SA, contrôlée elle-même à 100 % puis à 99 % et enfin à nouveau à 100 % par France Télécom.

L’Autorité de la concurrence a considéré, dans sa décision de 2009, que la présomption réfragable de responsabilité de la société-mère reconnue par le droit européen de la concurrence devait s’appliquer à l’espèce, dans la mesure où elle sanctionne l’abus de domination de la société Orange Caraïbe en application des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

S’agissant de cette présomption de responsabilité de la société France Télécom, cette dernière a tenté, sans succès, de la renverser en essayant d’apporter la preuve de l’autonomie de sa filiale aussi bien devant l’Autorité de la concurrence que devant la cour d’appel de Paris et, enfin, devant la Cour de cassation. Pour renverser la présomption, la Haute juridiction considère que la société-mère doit prouver l’autonomie de sa filiale en apportant des éléments relatifs aux « liens économiques, organisationnels et juridiques » rapprochant les deux entités. La Cour de cassation relève que le fait pour la filiale d’avoir défini une stratégie commerciale liée aux spécificités du marché local ne permet pas de prouver l’autonomie de celle-ci, car les dirigeants et les stratèges de la filiale sont des membres de la société-mère. La Cour retient également qu’en matière de représentation, les deux sociétés se sont toujours présentées auprès des clients et des partenaires de la société Orange Caraïbe comme constituant un même groupe.

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