Soc. 10 déc. 2015, FS-P+B, n° 14-21.852

Il est de jurisprudence constante que « les voies de recours dont un jugement est susceptible de faire l’objet sont régies par la loi en vigueur à la date de celui-ci ». En l’espèce, cette règle d’application de la loi dans le temps concernait l’article 608 du code de procédure civile. Celui-ci dispose que, « hors les cas spécifiés par la loi, les autres jugements en dernier ressort ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation indépendamment des jugements sur le fond. Le pourvoi peut être formé par le demandeur dans le délai de remise au greffe du mémoire afférent au pourvoi dirigé contre le jugement sur le fond ». Et cette règle a été modifiée par l’article 6 du décret n° 2014-1338 du 6 novembre 2014. En effet, jusqu’alors, lorsqu’il s’agissait de critiquer les motifs d’un arrêt avant dire droit, il fallait que le pourvoi soit formé à la fois à l’encontre de cet arrêt et à l’encontre de l’arrêt statuant au fond. Or, comme le fait remarquer la doctrine, cela était susceptible de poser problème quand l’existence d’un tel arrêt avant dire droit, non apparente à la lecture de la décision sur le fond, était seulement révélée lors de l’instruction du mémoire ampliatif, donc à un moment où le délai de pourvoi était expiré. Désormais, l’arrêt pourra être critiqué dans le délai de production du mémoire ampliatif soutenant le pourvoi dirigé contre la décision sur le fond prévu par l’article 978 du code de procédure civile.

Dans la présente affaire, un salarié avait été licencié pour cause réelle et sérieuse. Par un arrêt du 20 novembre 2006, la cour d’appel a sursis à statuer jusqu’à ce qu’il soit prononcé définitivement sur la plainte pénale déposée par la société à l’encontre du salarié. Ce n’est que par un arrêt du 28 mai 2014 que la cour d’appel a finalement dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté le salarié de ses demandes. Le salarié, suivant les prescriptions nouvelles de l’article 608, a accompagné son mémoire ampliatif afférent au pourvoi contre l’arrêt du 28 mai 2014 d’un pourvoi additionnel contre l’arrêt du 20 novembre 2006.

La Cour de cassation considère ce pourvoi irrecevable au motif que « les voies de recours dont un arrêt est susceptible sont régies par la loi en vigueur à la date de celui-ci, de sorte que l’arrêt rendu le 20 novembre 2006, qui n’avait pas fait l’objet du recours prévu par l’article 380-1 du code de procédure civile, ne pouvait être frappé d’un pourvoi en cassation indépendamment de l’arrêt sur le fond, en application de l’article 608 du code de procédure civile dans sa rédaction alors applicable ».

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