Soc. 10 juin 2015, FS-P+B, n° 13-26.638

En vertu de la règle de l’unicité de l’instance prud’homale, toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font l’objet d’une seule instance, qu’elles émanent du demandeur ou du défendeur. Depuis un arrêt du 13 juin 2012, cette règle n’entraîne toutefois l’irrecevabilité des demandes nouvelles que si une décision touchant le fond du droit a été rendue.

En l’espèce, un salarié qui avait été placé en préretraite a saisi une juridiction prud’homale en invoquant le principe « à travail égal, salaire égal », aux fins de faire condamner son employeur au paiement d’un rappel de salaire et d’un complément d’indemnité de départ à la retraite. La cour d’appel de Paris avait fait droit aux prétentions du salarié par un arrêt prononcé en juillet 2004. En mars 2007, le salarié saisissait à nouveau la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir notamment la condamnation de son employeur au règlement des cotisations à verser à l’Agirc, à la régularisation des cotisations au régime supplémentaire de retraite ainsi qu’au paiement d’un rappel de salaire de pensions de préretraite. Les juges du fond ont fait droit à cette demande, estimant qu’elle était nouvelle au motif qu’elle était la conséquence des mauvaises modalités d’exécution par l’employeur de la condamnation prononcée par la précédente cour d’appel.

La Cour de cassation rappelle dans un premier temps la règle selon laquelle « une instance ne peut être engagée postérieurement à une première procédure prud’homale que lorsque le fondement des nouvelles prétentions est né ou s’est révélé après l’extinction de l’instance primitive », les demandes formées dans une nouvelle procédure étant donc irrecevables dès lors que leur fondement est né avant la clôture des débats de l’instance antérieure. Elle conclut, dans un second temps, à la censure de l’arrêt d’appel, en considérant que dès l’instance initiale, le salarié pouvait joindre à sa demande principale toutes les demandes en découlant, dont celles du règlement des cotisations et pensions. Elle estime donc que les demandes étaient nées avant la clôture des débats devant la cour d’appel saisie de l’instance initiale et que, par conséquent, il ne s’agissait pas de demandes nouvelles en cause d’appel (C. trav., art. R. 1452-7). Dans le même sens, la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de considérer, en raison de la règle de l’unicité de l’instance, qu’une partie ne peut pas introduire un nouveau procès devant un conseil de prud’hommes lorsqu’une cour d’appel est saisie d’un litige opposant les mêmes parties relativement au même contrat de travail, quand le fondement des demandes est né ou révélé avant la clôture des débats.

C’était donc au salarié d’être vigilant dans la formulation de ses prétentions dès l’introduction de la première instance : la règle de l’unicité de l’instance sera ici sanctionnée par une fin de non-recevoir, ce qui signifie que les demandes du salarié en cause seront irrecevables sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir.

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