Soc. 14 févr. 2018, FS-P+B, n° 16-21.940

Une salariée d’une entreprise de travail temporaire a effectué vingt contrats de mission de manutentionnaire, pour la plupart fondés sur l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise utilisatrice. La salariée ayant saisi une juridiction prud’homale d’une demande de requalification des contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée (CDI), l’entreprise utilisatrice a appelé en garantie la société de travail temporaire. La cour d’appel a condamné l’entreprise de travail temporaire à garantir l’entreprise utilisatrice, dans la limite de 50 %, des condamnations prononcées contre elle à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité légale de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, de dommages-intérêts pour non-respect du droit individuel à la formation, en raison de la requalification en CDI des contrats de mission conclus par une salariée et de la rupture infondée qui en résulte.

Devant la Cour de cassation, l’entreprise de travail temporaire soutenait qu’elle ne disposait d’aucun moyen de surveillance et de contrôle de l’usage qui était fait par l’entreprise utilisatrice des contrats de mission, et qu’il ne pouvait donc lui être reproché d’avoir méconnu les dispositions relatives au délai de carence, ni d’avoir manqué à un prétendu devoir de conseil.

La haute juridiction reste toutefois insensible à ces arguments. Elle réaffirme en effet que si « l’entreprise utilisatrice ne peut invoquer, pour faire valoir auprès de l’entreprise de travail temporaire des droits afférents à la responsabilité contractuelle, la méconnaissance par cette dernière des obligations mises à sa charge à l’égard du salarié par les articles L. 1251-8, L. 1251-16 et L. 1251-17 du code du travail, il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement si un manquement peut être imputé à l’entreprise de travail temporaire dans l’établissement des contrats de mise à disposition ». Or, en l’espèce, il a été « constaté que les missions confiées à la salariée pendant plus de trois ans sur un poste de manutentionnaire ne permettaient pas d’écarter l’application du délai de carence ». La responsabilité solidaire de l’entreprise utilisatrice et de l’entreprise de travail temporaire doit donc être retenue.

Auteur : Éditions Dalloz – Tous droits réservés.