Soc. 23 juin 2021, n° 19-24.020 ; Soc. 23 juin 2021, n° 20-13.762

Le supérieur hiérarchique qui a connaissance de faits fautifs d’un salarié doit être considéré comme l’employeur même s’il n’est pas titulaire du pouvoir disciplinaire, concernant tant le point de départ du délai d’engagement de la procédure disciplinaire que la possibilité de sanctionner des faits antérieurs à une précédente sanction. Ainsi en a décidé la Cour de cassation dans deux arrêts du 23 juin 2021.

Dans la première affaire, un salarié avait été licencié pour des faits de dénigrement survenus en présence d’un formateur, lequel avait transmis un rapport de ces événements à la direction de la société onze jours plus tard. L’employeur a considéré avoir connaissance des faits fautifs à la date de ce rapport et a convoqué le salarié à un entretien préalable à sanction dans les deux mois suivant ce rapport, soit plus de deux mois après l’incident - rappelons ici qu’en application de l’article L. 1332-4 du code du travail, l’employeur dispose d’un délai de deux mois, à compter du jour où il a connaissance d’un fait fautif imputé à un salarié, pour engager une procédure disciplinaire s’il le souhaite. Or, le salarié soutenait que le formateur témoin des faits qui lui étaient reprochés était son supérieur hiérarchique, de sorte que le délai de prescription courait à compter du jour de la survenance des faits.

L’arrêt de la cour d’appel, qui avait retenu le jour du rapport à la direction comme point de départ du délai, est censuré. En effet, afin de déterminer ce point de départ, les juges du fond auraient dû rechercher si le formateur témoin de la scène était bien le supérieur hiérarchique du salarié.

Dans la seconde affaire, un salarié s’était vu notifier par la direction un avertissement pour divers manquements. Il avait ensuite été avisé d’une mise à pied conservatoire et convoqué à un entretien préalable à licenciement en raison d’autres faits, antérieurs à l’avertissement. La coordinatrice du salarié, qui avait pourtant connaissance de ces faits quatre jours avant la notification de l’avertissement, n’en a informé la direction que plusieurs jours après.

Or, il résulte de l’article L. 1331-1 du code du travail que l’employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés comme fautifs, choisit de n’en sanctionner que certains, épuise son pouvoir disciplinaire : il ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction. Dès lors, relève en l’espèce la Cour de cassation, puisque l’employeur au sens de ce texte s’entend aussi du supérieur hiérarchique d’un salarié, et qu’il n’était pas contesté que la coordinatrice qui avait connaissance de la faute avant la notification de la première sanction était bien le supérieur hiérarchique direct du salarié, l’employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire.

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