Soc. 10 déc. 2014, FS-PB, n° 13-22.422

Il arrive parfois que l’action en requalification de CDD en CDI pose certaines difficultés. La Cour de cassation a pu déjà préciser que lorsqu’une série de CDD non successifs est requalifiée en CDI, le salarié ne peut prétendre à un rappel de salaire correspondant aux périodes séparant chaque contrat, qu’à la condition de démontrer qu’il s’est tenu à la disposition de l’employeur pour effectuer un travail pendant ces périodes d’inactivité.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 décembre 2014, un salarié avait été employé en vertu de contrats à durée déterminée d’usage ou de contrats de remplacement de salariés permanents absents bénéficiant du statut d’intermittent technique et étant rémunéré au cachet par journée de travail. Il a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir la requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée ainsi qu’un rappel de salaire dans la limite de la prescription quinquennale. La cour d’appel a jugé cette action comme fondée au motif que l’ensemble des contrats de travail produits aux débats ont été signés par le salarié le jour de l’embauche et ne mentionnent pas les horaires de travail de chaque journée travaillée et que, faute de produire un planning prévisionnel, l’employeur ne rapporte pas la preuve que celui-ci n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur. À ce titre, la cour d’appel avait accordé un rappel de salaire. Mais la Cour de cassation censure cette position en ce qu’elle a accordé un rappel de salaire à temps plein au titre des périodes interstitielles. La haute juridiction précise très clairement « que la requalification d’un contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet ne porte que sur la durée du travail et laisse inchangées les autres stipulations relatives au terme du contrat » et que, « réciproquement, la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail » .

Le visa de l’article 1315 du code civil permet en revanche au salarié d’apporter la preuve qu’il s’était tenu à la disposition de l’employeur pendant les périodes interstitielles. Ce renversement de la charge de la preuve a été critiqué. Il peut paraître cohérent, en effet, que l’exécution des contrats de travail à durée déterminée requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée depuis le premier jour travaillé englobe par principe les périodes non travaillées. L’employeur étant tenu de fournir un travail au salarié, il se placerait ainsi dans l’obligation de verser un salaire pour ces périodes.  Toutefois, la Cour de cassation, depuis un arrêt de 2009, ne retient pas cette position : pour bénéficier d’un rappel de salaire, le salarié doit, d’une part, démontrer qu’il s’est tenu à la disposition de l’entreprise pendant les périodes intermédiaires et, d’autre part, il doit en apporter la preuve. Depuis, cette solution a fait l’objet de confirmations, notamment en matière de contrats d’intérim non successifs et de contrats à durée déterminée pour des missions d’enseignement.

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