Com. 10 juill. 2012, FS-P+B, n° 11-21.954

Lorsqu’un contractant, victime d’un dol, fait le choix de ne pas demander l’annulation du contrat, son préjudice réparable correspond uniquement à la perte d’une chance d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses. La chambre commerciale juge en ce sens, dans un arrêt de cassation du 10 juillet 2012.

En l’espèce, une société avait cédé à une autre la totalité des actions représentant le capital d’une entreprise qu’elle détenait et ayant pour activité la location longue durée de matériel informatique. L’acquéreur et le commissaire à l’exécution de son plan de continuation soutenaient que le cédant avait dissimulé, lors de la négociation, l’existence de contre-lettres consenties par l’entreprise à des locataires leur permettant d’acheter le matériel loué à un prix résiduel avantageux en fin de contrat. Ainsi, ils avaient mis en œuvre la procédure arbitrale prévue au contrat. La cour d’appel avait confirmé la sentence arbitrale en ce qu’elle avait retenu l’existence d’une réticence dolosive précontractuelle. Devant la cour d’appel de renvoi, l’acquéreur avait demandé que le cédant soit condamné au paiement de dommages-intérêts en réparation de la perte de chance d’avoir pu réaliser un autre investissement.

La cour d’appel retenait que l’acquéreur pouvait obtenir « réparation de la perte de chance de conclure un contrat plus avantageux sans avoir demandé la nullité du contrat affecté de dol ». À ses yeux, la perte de chance pour cette société « de réaliser une meilleure opération, si elle avait été complètement informée, est sans lien avec la conservation des actions de la société (…) dans son patrimoine, le préjudice résultant de cette perte de chance s’étant produit au moment de la réalisation de l’opération ». Par ailleurs, elle soutenait que la décision de la société « de maintenir le contrat n’a pas rompu le lien de causalité entre la faute précontractuelle et le préjudice dont il est demandé réparation ».

La chambre commerciale casse l’arrêt au visa des articles 1116 et 1382 du code civil. Elle estime que la société « ayant fait le choix de ne pas demander l’annulation du contrat, son préjudice réparable correspondait uniquement à la perte d’une chance d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses ».

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