Soc. 1er juill. 2020, n° 18-24.180

Selon la chambre sociale de la Cour de cassation, « il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l’article R.1452-7 du Code du travail, aux termes desquelles les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel, demeurent applicables aux instances introduites devant les conseils de prud’hommes antérieurement au 1er août 2016 ».

Cette date marque l’abrogation des articles R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail qui énonçaient la règle de l’unicité de l’instance en matière prud’homale. Cette règle imposait aux parties au contrat de travail de formuler toutes les demandes liées à ce contrat dans le cadre d’une seule instance. Il en résultait une irrecevabilité de toute demande nouvelle se rattachant au même contrat de travail que la demande déjà jugée, peu important qu’elle n’eût pas le même objet que celles formulées lors de l’instance initiale. Les parties pouvaient cependant formuler de nouvelles demandes dérivant du contrat en cours d’instance, y compris devant le juge d’appel.

Or en l’espèce, une salariée, engagée en 2009 par une compagnie aérienne, avait saisi le conseil de prud’hommes le 25 septembre 2015. Elle s’estimait victime de faits de discrimination et de harcèlement moral et demandait, à ce titre, le paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral. Alors qu’elle avait été licenciée le 10 octobre 2016, elle a interjeté appel le 11 mai 2017 du jugement l’ayant déboutée de toutes ses demandes et a présenté, en appel, des demandes nouvelles au titre de la rupture de son contrat de travail. Le 16 octobre 2018, la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion a déclaré irrecevables ces demandes, au motif, d’une part, qu’elles étaient nouvelles car elles n’avaient pas été présentées devant le premier juge ; d’autre part, que l’article R. 1452-7 avait été abrogé au 1er août 2016. Selon les juges du fond, les dispositions du décret du 20 mai 2016, instaurant des règles de procédure, étaient d’application immédiates pour les instances postérieures à son entrée en vigueur. La salariée ayant interjeté appel le 11 mai 2017, le principe d’unicité de l’instance, applicable devant le premier juge, ne l’était plus devant le second.

Devant la Cour de cassation, la salariée affirmait que l’instance ayant été introduite en 2015, avant l’entrée en vigueur du décret de 2016, la règle de l’unicité de l’instance devait s’appliquer jusqu’à ce qu’une décision irrévocable soit rendue sur le fond, y compris devant la cour d’appel saisie après le 1er août 2016. Sensible à cette argumentation, la haute juridiction casse l’arrêt d’appel.

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