Civ. 2e, 7 mai 2014, F-P+B, n° 13-16.095

La durée légale du travail se calcule, en principe, dans un cadre hebdomadaire équivalent à trente-cinq heures (C. trav., L. 3121-10). Toutefois, les outils juridiques créés depuis l’ordonnance n° 82-41 du 16 janvier 1982 relative à l’aménagement du temps de travail, renforcée par les lois n° 2000-37 du 19 janvier 2000 et n° 2008-789 du 20 août 2008, aboutissent à une certaine flexibilité en faveur des employeurs. L’intention du législateur était « de répondre aux impératifs de fonctionnement de l’entreprise ou de branche dont l’activité est susceptible de connaître des fluctuations régulières et prévisibles en cours d’année du fait notamment du caractère saisonnier de cette activité » (Circ. 23 févr. 1982 relative à la durée du travail et aux congés payés, JORF 13 mars). Cette modulation permet ainsi de faire varier la durée hebdomadaire de travail sur tout ou partie de l’année, de telle sorte que les semaines de haute activité soient compensées par des semaines de moindre activité. Dès lors, les heures travaillées chaque semaine au-delà de trente-cinq heures ne sont pas considérées comme des heures supplémentaires dans la mesure où elles sont récupérées dans les semaines basses. Se pose alors, outre le problème de la comptabilisation des temps d’absence, celui de l’application de la modulation aux contrats saisonniers.

En l’espèce, à la suite d’un contrôle portant sur la période courant du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, l’URSSAF a notifié à une société un redressement portant, en particulier, sur la réintégration dans les bases de cotisations des heures supplémentaires effectuées par les travailleurs saisonniers employés par la société. Contestant ce redressement, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale. Déboutée en appel, la demanderesse faisait valoir, au soutien de son pourvoi, que les contrats saisonniers sont une variété de contrats à durée déterminée et qu’il doit être tiré de cet état de fait qu’ils sont expressément soumis par la loi aux accords de modulation du temps de travail. Par conséquent, selon la société, le seuil de déclenchement de la majoration pour heures supplémentaires doit être le même pour tous les salariés de l’entreprise, même ceux qui, en tant que travailleurs saisonniers, ne sont pas présents toute l’année.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en rappelant qu’aux termes de l’article 8 de la loi du 19 janvier 2000, les accords de modulation et de réduction de la durée du travail conclus sur le fondement des articles L. 212-2-1 et L. 212-8 anciens du code du travail tels qu’issus de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 demeurent en vigueur sous réserve de l’application du régime des heures supplémentaires aux heures excédant une durée moyenne sur l’année de trente-cinq heures par semaine. Dès lors, elle en déduit que le contrat saisonnier est par nature incompatible avec l’accord collectif d’aménagement et de réduction du temps de travail. Les heures effectuées certaines semaines au-delà des trente-cinq heures devaient ainsi être soumises au régime des heures supplémentaires et être réintégrées comme telles dans l’assiette des cotisations de la société.

La solution, qui doit être approuvée, ne surprend pas dans la mesure où l’employeur ne peut prétendre appliquer un système dérogatoire au droit commun à des salariés dont il sait dès l’origine qu’ils ne bénéficieront pas de la modulation annuelle entre les périodes hautes et périodes basses, qui leur est par hypothèse inapplicable, sauf à remettre en cause le caractère saisonnier de leur emploi. 

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