Com. 13 févr. 2019, FS-P+B+I, n° 17-18.049

En matière de prévention des difficultés des entreprises, l’article L. 611-15 du code de commerce prévoit que « Toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité ». La jurisprudence a, quant à elle, précisé que ce principe fait obstacle à toute diffusion par voie de presse, à moins que cette diffusion ne contribue à la nécessité d’informer le public sur une question d’intérêt général.

Ainsi, dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 13 février dernier, un site d’informations financières en ligne considérait qu’il avait communiqué des informations dans le cadre de la liberté de la presse, en nourrissant un débat d’intérêt général sur les difficultés d’une entreprise avec ses répercussions sur l’emploi et l’économie nationale. A l’opposé, le conciliateur et le débiteur soutenaient que la communication d’informations précises sur la situation de l’entreprise (données financières chiffrées, évolution des négociations dans le cadre d’une mesure de prévention amiable) causait un tort considérable à cette dernière en ébruitant ces difficultés. Aussi avaient-ils sollicité du juge des référés qu’il ordonne le retrait de l’ensemble des articles et interdise d’en publier de nouveaux. Le juge avait fait droit à leur demande.

Cette mesure de retrait et d’interdiction était-elle nécessaire dans une société démocratique, au sens de l’article 10, § 2, de la Convention européenne des droits de l’homme ? Poursuivait-elle un but légitime et, le cas échéant, y était-elle proportionnée ?

La Cour de cassation répond par l’affirmative. Elle estime que les articles litigieux n’étaient pas de nature à nourrir un débat d’intérêt général sur les difficultés d’un grand groupe industriel mais tendaient principalement à satisfaire les intérêts des abonnés, en l’occurrence un public spécialisé dans l’endettement des entreprises. Dès lors, leur publication risquait de causer un préjudice considérable aux sociétés du groupe ainsi qu’aux parties appelées à la procédure de prévention amiable. Le déroulement de la prévention, ainsi que son issue, pouvaient en conséquence être gravement compromis. La mesure prononcée était donc justifiée.

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