CAA Paris, 2e ch., 1er juin 2022, n° 21PA00400

Au regard du droit fiscal, une société de création artistique peut-elle être considérée comme l’auteur d’une œuvre d’art ? La cour administrative d’appel de Paris a répondu par la négative à cette question, dans un arrêt rendu le 1er juin dernier.

Pour la vente de tableaux à une galerie d’art française, un peintre britannique avait eu recours à l’intermédiaire d’une société britannique à risques limités portant son nom et ayant pour objet des activités de création artistique. Il s’agissait alors d’une transaction intracommunautaire, les faits datant de 2014. La vente des tableaux était donc soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au sein de l’Union européenne régie par la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée.

Lors de la revente des œuvres, la galerie a opté pour l’application de la TVA sur la marge – un régime qui permet d’adopter des modalités particulières de calcul de la TVA et qu’il n’est possible d’utiliser que lorsque les biens revendus ont été acquis auprès de particuliers, non assujettis à cette taxe. Toutefois, par la suite, la galerie s’est vu réclamer des rappels de TVA sur les transactions liées à ces tableaux. En effet, selon l’administration fiscale, elle n’était pas fondée à utiliser le calcul de la taxation sur la marge puisqu’elle avait acheté les tableaux auprès d’une société, laquelle devait être considérée comme un professionnel et donc un assujetti-revendeur au regard de la TVA.

Tel est également le raisonnement suivi par la cour administrative d’appel. Celle-ci s’appuie sur la directive 2006/112/CE aux termes de laquelle le régime de la marge s’applique aux « objets d’art livrés par l’auteur ou par ses ayants droit ». Or, une annexe de ce même texte énonce par ailleurs que les tableaux ne font partie de cette catégorie que s’ils ont été « entièrement exécutés à la main par l’artiste ». La cour en déduit que l’auteur d’un tableau est la personne qui a peint la toile à la main et ne saurait être une personne morale.

Dès lors, la société britannique ne peut, en l’occurrence, être reconnue comme l’auteur des tableaux livrés, et ce quand bien même elle serait reconnue comme artiste par le droit britannique. En outre, cette société doit bien être considérée un assujetti-revendeur puisqu’elle a affecté les tableaux en cause à son activité de revente d’œuvres réalisées par l’un de ses associés. Par conséquent, la galerie ne pouvait pas appliquer le régime de la marge.

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