Soc. 12 mai 2021, n° 19-23.428

Une demande en annulation d’élections professionnelles peut-elle être valablement déposée avant que celles-ci aient eu lieu ? Oui, a répondu la Cour de cassation le 12 mai 2021 dernier. Au visa de l’article R. 2314-24 du code du travail, elle a rappelé classiquement que lorsque la contestation porte sur la régularité de l’élection ou sur la désignation de représentants syndicaux, la déclaration n’est recevable que si elle est faite dans les quinze jours suivant cette élection ou cette ou cette désignation. Surtout, la Cour a ajouté que « celui qui saisit le tribunal d’instance, avant les élections, d’une demande d’annulation du PAP (protocole d’accord préélectoral), est recevable à demander l’annulation des élections à venir en conséquence de l’annulation du PAP sollicitée ».

En l’espèce, des négociations avaient été menées dans une société de la grande distribution entre la direction et les organisations syndicales représentatives afin d’y mettre en place des comités sociaux et économiques (CSE) d’établissement. Restées infructueuses, ces négociations ont été suppléées par une décision unilatérale de l’employeur fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein de la société sur une branche particulière de l’entreprise (hypermarchés, supermarchés, direction des systèmes d’information, direction des approvisionnements et fonctions amont), à l’exclusion de la branche « proximité » regroupant les gérants non-salariés. Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) a ensuite rendu une décision en statuant sur le recours de plusieurs syndicats contre l’acte unilatéral de l’employeur, décidant que devaient être considérés comme des établissements distincts en matière d’élections professionnelles « tous les hypermarchés et supermarchés ; la direction des systèmes d’information ; la direction des approvisionnements ; la direction amont » mais aussi « les quatre directions régionales regroupant les gérants mandataires non-salariés ».

Le comité central d’entreprise s’est alors réuni pour voter le passage de quatre régions à trois assimilées à des établissements, à la suite de quoi un protocole d’accord préélectoral a été conclu prévoyant trois établissements pour la branche proximités regroupant les gérants non-salariés. Or le syndicat des gérants non-salariés a saisi le tribunal d’instance afin d’annuler le PAP, le premier tour des élections des membres de la représentation des gérants mandataires non salariés, et sollicité la convocation des organisations syndicales en vue de la négociation d’un nouveau PAP entérinant l’organisation en quatre établissements distincts comme l’avait initialement décidé le Direccte.

La demande du syndicat a été rejetée par les juges du fond. Ceux-ci ont considéré que la requête en annulation était irrecevable dans la mesure où elle avait été déposée au greffe le 13 mai 2019, date à laquelle le premier tour des élections professionnelles, prévu au 29 mai 2019, n’avait pas encore eu lieu, et que le délai de contestation n’était pas encore ouvert à la date de saisine. La décision est cassée sur ce point.

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