CE 27 avr. 2022, n° 437735

Un salarié protégé a signalé des faits susceptibles d’avoir été commis par certains salariés de son entreprise et pouvant recevoir la qualification de délit d’abus de biens sociaux. Le ministère chargé du travail a autorisé son licenciement pour faute disciplinaire. L’intéressé a alors sollicité du juge administratif l’annulation de cette décision. Néanmoins, après avoir relevé que les accusations formulées par le demandeur n’étaient étayées par aucun élément probant et mettaient en cause la probité des salariés et l’image de la société, le fait qu’elles eussent été formulées dans le cadre des fonctions syndicales de l’intéressé n’étant pas de nature à leur ôter leur caractère fautif, la cour administrative d’appel a jugé que la ministre du Travail avait pu légalement estimer que ces faits constituaient une faute suffisamment grave pour justifier son licenciement.

Le Conseil d’État rappelle quant à lui les trois conditions, définies par le premier alinéa de l’article L. 1132-3-3 du code du travail, faisant obstacle au licenciement d’un salarié : les faits dénoncés sont susceptibles de recevoir la qualification de crime ou de délit, le salarié en a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et a agi de bonne foi.

Le second alinéa prévoit un aménagement des règles de dévolution de la preuve lorsqu’un salarié conteste des mesures défavorables prises à son encontre en faisant valoir qu’elles sont, en réalité, motivées par une déclaration ou un témoignage effectué dans les conditions prévues au premier alinéa de cet article. Toutefois, relève la haute juridiction, « ces dispositions sont sans application lorsque la mesure contestée par le salarié est expressément fondée sur ce signalement ».

Le Conseil ajoute que « dans le cas où il est saisi de la légalité d’une décision prise par l’autorité administrative sur une demande d’autorisation d’un licenciement expressément motivé par un tel signalement, il appartient au juge de l’excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu de l’ensemble des éléments versés au dossier par les parties, le cas échéant après avoir mis en œuvre ses pouvoirs généraux d’instruction des requêtes ».

Par conséquent, en statuant comme elle l’a fait, sans rechercher si les dispositions de l’article L. 1132-3-3 du code du travail, dont le salarié protégé se prévalait, faisaient obstacle à ce que l’autorité administrative autorise son licenciement, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.

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