Civ. 1re, 16 juin 2021, n° 19-21.663

Un producteur a conclu avec une université, agissant pour le compte d’un Institut interne, une convention de cession des droits ayant pour objet la réalisation d’une œuvre audiovisuelle documentaire. Il cédait à l’université, à titre non exclusif et en contrepartie du financement qu’elle apportait, les droits d’exploitation non commerciale pour une durée illimitée sur tous supports en vue de la représentation du film dans le cadre de ses activités d’enseignement et de recherche. Il avait également conclu avec un réalisateur un contrat de cession de droits d’auteur qui prévoyait qu’aucun des deux ne pourrait utiliser ou exploiter les rushes non montés « sauf autorisation réciproque expresse et préalable » de l’autre. Affirmant avoir découvert que des DVD reproduisant, sans son autorisation, le documentaire ainsi que des éléments des rushes issus du tournage, non compris dans la version définitive du film, étaient édités et distribués par l’Institut, le producteur a assigné l’université en contrefaçon de droits d’auteur, responsabilité contractuelle, concurrence déloyale et parasitisme.

La Cour de cassation rappelle tout d’abord le caractère autonome du droit voisin des producteurs de vidéogrammes, lequel ne se confond pas avec les droits d’auteur dont les rushes peuvent par ailleurs faire l’objet. La haute juridiction retient ainsi qu’en application de l’article L. 215-1 du code de la propriété intellectuelle, le producteur de vidéogrammes est titulaire du droit d’autoriser la reproduction, la mise à la disposition ou la communication au public des épreuves de tournage non montées ou rushes dont il a eu l’initiative et la responsabilité de la première fixation.

S’agissant ensuite de l’éventuelle responsabilité contractuelle de l’université, la Cour reproche aux juges du fond d’avoir rejeté les demandes du producteur à ce titre sans avoir recherché si l’université n’avait pas manqué à son obligation d’exécuter le contrat de bonne foi en exploitant les rushes sans l’autorisation du producteur, alors qu’elle connaissait la nécessité de cette autorisation.

Quid du fait que l’arrêt d’appel ait considéré qu’il n’a pas été porté atteinte aux droits de propriété du producteur sur les masters dès lors que le contrat conclu avec l’université prévoit la remise d’une version master du film à l’Institut ? Là encore, indique la première chambre civile, les juges du fond auraient dû répondre aux conclusions du producteur qui soutenait que l’université n’était pas en droit de conserver les matrices des rushes, distinctes des matrices du film achevé.

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