Soc. 17 oct. 2012, FS-P+B, n° 11-15.699

Dès lors que les salariés ne sont pas à la disposition de l’employeur pendant les pauses, les primes les rémunérant, qui ne sont pas la contrepartie du travail, sont exclues du salaire devant être comparé au SMIC et, à défaut de stipulation conventionnelle contraire, de celui à comparer au salaire minimum mensuel garanti.

La détermination des éléments qui composent le salaire minimum établi par la convention collective relève, en principe, de la libre volonté des partenaires sociaux. Que se passe-t-il lorsque ces derniers ne se sont pas prononcés sur l’assiette du salaire minimum conventionnel ? Dans le présent arrêt, la Cour de cassation décide, à ce propos, qu’en l’absence de stipulations contraires expressément mentionnées par la convention collective, seules les sommes perçues en contrepartie du travail doivent être prises en compte dans le calcul de la rémunération à comparer avec le salaire minimum mensuel garanti. La solution sonne a priori comme un rappel de jurisprudence, la Cour ayant statué en des termes quasiment identiques. Toutefois, la « contrepartie », en l’occurrence érigée comme critère des éléments composant le salaire minimum conventionnel, n’a pas toujours été préférée par la Cour. Celle-ci a pu, en effet, inclure dans le salaire minimum garanti les sommes versées non seulement en contrepartie du travail mais, également, à l’occasion du travail, optant ainsi pour une assiette large. Elle avait toutefois renoué avec un critère plus restrictif, ce qu’un arrêt rendu en 2010 avait confirmé en ne visant que le seul critère de la « contrepartie ». Voilà cependant que la Cour est revenue, il y a quelques mois, dans un arrêt inédit, sur un critère plus souple en se référant à nouveau au critère de l’« occasion » (Soc. 27 juin 2012, n° 11-16.103). Peut-être est-il alors question, dans un arrêt cette fois-ci publié au Bulletin, de s’assurer définitivement de la continuité du changement opéré, de manière expresse, en 2010.

Cela a permis, en l’espèce, à la Cour d’exclure de l’assiette du salaire minimum conventionnel la prime de pause dont les salariés de la société Auchan bénéficient en vertu d’une convention collective qui ne détermine pas la composition du salaire minimum qu’elle fixe. Il faut donc en déduire que la prime de pause n’est pas la contrepartie du travail, ce que confirme clairement la Cour dans la seconde partie de son arrêt.

La chambre sociale affirme que, dès lors qu’il n’est pas contesté que, pendant les pauses, les salariés n’étaient pas à la disposition de l’employeur, de sorte que celles-ci ne constituaient pas du temps de travail effectif, les primes les rémunérant, qui ne sont pas la contrepartie du travail, sont exclues du salaire devant être comparé au SMIC. Elle confirme, de la sorte, le dernier état de sa jurisprudence. Si elle a, un temps, décidé d’exclure du salaire minimum légal les primes de pause forfaitaires, intégrant, en revanche, celles qui seraient proportionnelles au temps de travail effectif (Soc. 13 juill. 2010, Bull. civ. V), elle se rallia à la position adoptée par la chambre criminelle (Crim. 15 févr. 2011, Bull. crim., nos 27 et 28), qui, pour exclure la prime de pause du SMIC, obligeait à vérifier que la pause ne correspondait ni à un travail effectif ni à un complément de salaire de fait. Mais elle s’en démarqua néanmoins en écartant toute vérification de l’existence d’un complément de salaire de fait et en ne se référant qu’aux critères du travail effectif et de la « contrepartie » (Soc. 21 mars 2012, nos 10-21.737 et 10-27.425, Bull. civ. V, n° 105). Malgré les critiques dont il a pu faire l’objet sur ce point, ce dernier arrêt est entièrement confirmé. La rémunération d’un temps de pause durant lequel le salarié n’est pas à la disposition de l’employeur ne présente aucun lien avec la prestation fournie par le salarié. La rémunération d’un non-travail, d’une période où le salarié est libre de vaquer à ses occupations, n’est pas la contrepartie d’un travail.

Reste, cependant, que la Cour semble unifier, par le biais des deux problèmes posés, l’assiette du salaire à comparer avec le salaire minimum légal et, en l’absence de stipulation conventionnelle contraire, avec le salaire minimum conventionnel. Le critère qui prévaut dans les deux cas est celui d’un lien direct avec la prestation : l’élément de rémunération doit être la contrepartie du travail.

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