Civ. 2e, 24 nov. 2016, F-P+B, n° 15-24.957

Les dispositions de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale sous l’empire de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 instituaient, au bénéfice des femmes assurées sociales, une majoration de leur durée d’assurance d’un trimestre pour toute année durant laquelle elles ont élevé un enfant, dans la limite de huit trimestres par enfant. Toutefois, depuis 2009, la Cour de cassation considère que la différence entre les hommes et les femmes est incompatible avec l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle estime « qu’une différence de traitement entre hommes et femmes ayant élevé des enfants dans les mêmes circonstances ne peut être admise qu’en présence d’une justification objective et raisonnable. En l’absence d’une telle justification, l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale qui réserve aux femmes le bénéfice d’une majoration de salaire pour avoir élevé un ou plusieurs enfants est incompatible avec ces stipulations ». C’est ainsi que l’article L. 351-4, dans la version en vigueur de la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009, ne subordonne plus l’attribution de la majoration d’assurance à la condition que l’assuré ait élevé seul ses enfants.

Une période transitoire avait néanmoins été instituée pour tous les enfants nés ou adoptés avant le 1er janvier 2010, selon laquelle la majoration d’assurance pour éducation est attribuée à la mère, sauf si, dans le délai qu’il détermine, le père apporte la preuve qu’il élève seul les enfants au cours de leurs quatre premières années. Et selon la Cour de cassation, ce régime transitoire ne constituait pas une discrimination au sens de l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention. Par l’arrêt ici rapporté, la Cour de cassation poursuit son œuvre de clarification de l’article L. 351-4 précité.

En l’espèce, un assuré né en 1944, bénéficiaire depuis le 1er octobre 2004 d’une pension de vieillesse versée par la caisse d’assurance retraite, a sollicité le 16 décembre 2009 une majoration de sa durée d’assurance en application des dispositions de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale, au titre de ses quatre enfants. À la suite du rejet de la caisse, il a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale. Déboutée en appel, la caisse forme un pourvoi en cassation, arguant, sur le fondement de l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 applicable en la cause, que seul l’homme qui a élevé seul l’un de ses enfants peut prétendre au bénéfice de la majoration de carrière.

La Cour de cassation rejette cet argument conformément à sa décision de 2009, au motif que les dispositions issues de la loi du 21 août 2003 avaient déjà été jugées incompatibles avec les articles 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention. Toutefois, l’arrêt de la cour d’appel est censuré. La haute juridiction rappelle en effet la lettre du texte applicable : le bénéfice de la majoration pour avoir élevé un enfant de la durée d’assurance retenue pour la détermination de la pension de retraite est limité, quel que soit le nombre des bénéficiaires de droits à pension, à huit trimestres par enfant. Ainsi, il ne peut être cumulé, pour un même enfant, un avantage de même nature accordé à la mère de famille. 

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