Soc. 31 oct. 2012, FS-P+B, n° 11-12.810

L’employeur qui dispense le salarié d’exécuter le préavis est tenu de verser, sans déduction des indemnités journalières de la sécurité sociale, l’indemnité compensatrice de préavis, peu importe que le salarié soit déjà en arrêt de travail pour maladie non professionnelle lors de la dispense d’exécution. 

La Cour de cassation avait initialement posé pour principe que les indemnités journalières versées par la sécurité sociale au titre de la maladie du salarié ne pouvaient pas se cumuler avec l’indemnité compensatrice de préavis (Soc. 27 nov. 1991, n° 87-42.750). En effet, la chambre sociale soulignait que le salarié ne pouvait, pour une même période correspondant au délai-congé, cumuler des indemnités journalières versées au titre du régime général de la sécurité sociale compensant les pertes de salaire pendant sa maladie et une indemnité compensant la perte de ces mêmes salaires du fait de l’inexécution du préavis (Soc. 3 mars 1994, n° 90-43.023).

La chambre sociale a infléchi sa position en décidant que, lorsque le licenciement est nul, le salarié a droit à l’indemnité compensatrice de préavis et qu’il n’appartient pas à l’employeur d’opérer une réduction sur le montant de cette indemnité dont il doit verser le montant intégral pour toute la durée où le préavis aurait dû être exécuté (Soc. 10 mai 2006, n° 04-40.901). Elle énonçait ultérieurement que, lorsque le licenciement d’un salarié pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d’un manquement de l’employeur à son obligation de reclassement, le salarié a droit au paiement de l’indemnité compensatrice de préavis qui se cumule avec les indemnités journalières éventuellement versées par la sécurité sociale (Soc. 9 juill. 2008, n° 06-44.240). Récemment, la chambre sociale précisait que l’employeur qui a dispensé le salarié de l’exécution de son préavis en raison de la cessation d’activité de l’entreprise ne peut soustraire le montant des indemnités journalières versées par la sécurité sociale de l’indemnité compensatrice de préavis à laquelle il est tenu (Soc. 4 avr. 2012, nos 11-11.616 et 10-23.536).

Le présent arrêt consacre cette évolution jurisprudentielle, puisque la Cour censure la décision du juge du fond qui a donné satisfaction à l’employeur qui considérait que l’indemnité de préavis n’était pas due pour la période d’arrêt maladie. Le cumul sera, semble-t-il, possible dès lors que le salarié ne pourra pas exécuter son préavis du fait de l’employeur, soit qu’il l’en empêche, soit qu’il l’en dispense.

Si le versement de l’indemnité compensatrice est acquis, il est, en revanche, permis de se demander si le salarié a véritablement droit aux prestations en espèces dans ce cas. Non pas qu’il contreviendrait aux prescriptions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale mais l’article L. 321-1-5° de ce même code prévoit que les indemnités journalières sont octroyées à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique constatée par le médecin traitant de « continuer ou de reprendre le travail ». On peut supposer qu’il ne s’agit pas du travail en général mais de cette activité salariée en particulier, pour laquelle, dans notre cas de figure, les parties sont encore liées au cours de la période de préavis. Les indemnités journalières apparaissent alors naturellement comme un substitut du salaire. Or le salarié a déjà perçu une indemnité en lieu et place de sa rémunération, sans travail à effectuer en contrepartie et, donc, peu importe qu’il soit ou non en mesure de travailler. Cette situation semble s’opposer au versement des indemnités journalières car la demande du salarié est devenue sans objet. Cette question pourrait susciter l’intérêt des caisses primaires d’assurance maladie.

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