Soc. 11 mai 2016, FS-P+B, n° 14-12.169

M. X, engagé le 1er juillet 1987 en qualité de menuisier industriel, a été victime d’un accident du travail le 28 octobre 1996. Licencié le 18 septembre 2006 pour inaptitude après constatation de l’impossibilité de le reclasser, il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes. L’une d’elles concernait l’absence de consultation des délégués du personnel lors de la procédure de licenciement du salarié, prévue à l’article L. 1226-10 du code du travail. Une autre portait sur le bénéfice de la durée de préavis conventionnel prévue pour les personnes handicapées.

La question de l’absence de consultation des délégués du personnel était compliquée par une difficulté d’application de la loi dans le temps. Le 31 octobre 2002, il n’y avait dans l’entreprise aucun candidat aux élections de délégués du personnel. Aussi un procès-verbal (PV) de carence avait-il été établi. Les prochaines élections étaient donc prévues pour le 31 octobre 2004. À cette époque, le mandat des délégués du personnel était de deux ans. Mais la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 est venue allonger la durée des mandats de ces représentants à quatre ans. Le licenciement du salarié pour inaptitude à la suite de son accident du travail est intervenu le 18 septembre 2006, soit plus de deux ans après le PV de carence mais moins de quatre ans avant la tenue des prochaines élections, si l’on applique la nouvelle durée du mandat. Il s’agissait donc de savoir si, au moment du licenciement pour inaptitude, l’absence de consultation du délégué du personnel pouvait être justifiée par le PV de carence établie le 31 octobre 2002 ou si, au contraire, ce PV n’était plus valable.

Pour la cour d’appel, la loi de 2005 a eu pour effet de prolonger la validité du PV de carence de deux ans. Mais la chambre sociale remarque quant à elle que « faute d’élections professionnelles dans l’entreprise postérieurement à la publication de la loi, le mandat des délégués du personnel demeurait de deux ans et qu’à l’expiration de la période de deux années après l’établissement du procès-verbal de carence le 31 octobre 2002, l’employeur devait procéder à l’organisation de nouvelles élections ». En conséquence, « il résulte de l’article L. 1226-10 du code du travail que l’avis des délégués du personnel doit être recueilli avant que la procédure de licenciement d’un salarié inapte à son emploi en conséquence d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne soit engagée et que l’employeur ne saurait se soustraire à cette obligation dès lors que la mise en place de tels délégués est obligatoire en application de l’article L. 2312-2 du code du travail et qu’aucun procès-verbal de carence n’a été établi ». La sanction du manquement à cette obligation est de reconnaître le licenciement comme étant sans cause réelle et sérieuse et d’allouer au salarié une indemnité réparant l’intégralité du préjudice et ne pouvant être inférieure à douze mois de salaire, comme le prévoit l’article L. 1226-15 du code du travail.

Sur la question de la durée du préavis, l’article 7 de l’accord du 30 octobre 1990 relatif à l’emploi des travailleurs handicapés rattaché à la convention collective de la plasturgie prévoit, en cas de licenciement d’un travailleur handicapé, que la durée du préavis est doublée et peut donc être au maximum de quatre mois, à condition que le travailleur ait une ancienneté d’au moins un an dans l’entreprise.

La cour d’appel a estimé « qu’il n’est pas justifié que la qualité de travailleur handicapé de M. X, qui lui a été reconnue le 14 septembre 20[0]4 était connue de l’employeur, et qu’en tout état de cause, la survenance du handicap au cours de l’exécution du contrat de travail ne lui permet pas de bénéficier des dispositions de l’article 7 de l’accord du 30 octobre 1990 annexé à la convention collective de la plasturgie du 1er juillet 1960 ».

La Cour de cassation juge cependant ces motifs inopérants, dans la mesure où la cour d’appel avait constaté « que le salarié avait plus d’un an d’ancienneté dans l’entreprise et que la qualité de travailleur handicapé lui avait été reconnue antérieurement au licenciement, ce dont elle devait déduire le doublement de l’indemnité de préavis, plus favorable au salarié que les dispositions de l’article L. 1226-14 du code du travail, la cour d’appel ». 

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