Soc. 6 févr. 2013, P+B+R, n° 11-23.738

Au regard de la nature de sanction civile de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L. 8223-1 du code du travail, rien ne s’oppose au cumul de cette indemnité avec l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. 

La question du cumul de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé allouée au salarié et d’indemnités de toute nature en cas de rupture de la relation de travail donne lieu à un véritable feuilleton judiciaire. Par la présente décision, la Cour de cassation opère un nouveau revirement puisqu’elle autorise le cumul de l’indemnité forfaitaire de l’article L. 8223-1 du code du travail avec l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. 

La chambre sociale a tout d’abord décidé que l’indemnité forfaitaire instituée par le premier alinéa de l’article L. 324-11-1 du code du travail (L. 8223-1 nouv.) ne se cumule pas avec les autres indemnités auxquelles le salarié peut prétendre au titre de la rupture de son contrat de travail, seule l’indemnisation la plus favorable devant lui être accordée (Soc. 15 oct. 2002, n° 00-45.082, Bull. civ. V). Mais elle a, par la suite, énoncé que l’indemnité forfaitaire prévue en cas de travail dissimulé peut se cumuler avec l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité de congés payés et l’indemnité conventionnelle de licenciement (Soc. 25 mai 2005, n° 02-44.468, Bull. civ. V, n° 181). On pouvait alors penser que toute forme de cumul serait possible. La Cour en a pourtant décidé autrement en affirmant que les dispositions de l’article L. 324-11-1 du code du travail (L. 8223-1 nouv.) ne font pas obstacle au cumul de l’indemnité forfaitaire qu’elle prévoit avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail, à la seule exception de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement (Soc. 12 janv. 2006, nos 04-42.190, 04-41.769, 04-40.991, 04-42.159, 03-44.776 et 03-44.777, Bull. civ. V, n° 13). La recodification, effectuée à droit constant n’y a rien changé. En effet, le nouvel article L. 8223-1 du code du travail prévoit bien que le salarié a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire mais ne précise plus « […] six mois de salaire, à moins que l’application d’autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable ».

La Cour fonde la possibilité du cumul sur la nature de sanction civile de l’indemnité forfaitaire, déjà retenue par la chambre sociale (Soc. 14 avr. 2010, n° 08-43.124, Bull. civ. V, n° 101). Comme un auteur a pu le souligner, la nature de sanction civile attribuée par la chambre sociale tranche avec le caractère réparateur reconnu par le Conseil Constitutionnel à cette indemnité forfaitaire (Cons. const., 25 mars 2011, n° 2011-111 QPC), ce qui lui permet d’être opportunément déclarée conforme à la Constitution. Elle comporte pourtant une « facette punitive » au point de pouvoir être comparée, non sans raison, aux dommages et intérêts punitifs (ibid.). Le caractère indemnitaire de la somme forfaitaire a également pu être affirmé par la chambre sociale, ce qui l’exonère de cotisations sociales (Soc. 20 févr. 2008, nos 06-44.964 à 06-44.967, Bull. civ. V, n° 42). Une lecture finaliste guide visiblement les juridictions saisies, la réponse apportée répondant aux besoins de la cause. Le but poursuivi est sans nul doute de favoriser le salarié victime du travail dissimulé et de sanctionner l’employeur.

Par cette décision, la Cour décide, par ailleurs, que l’utilisation par le destinataire des messages téléphoniques vocaux, dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur, n’est pas un procédé déloyal. Il est établi que les procédés de surveillance clandestins ne permettent pas de constituer une preuve valable car tout dispositif de contrôle doit être préalablement porté à la connaissance des salariés.

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