Cass., ass. plén., 5 avr. 2019, P-B+R+I, n° 18-17.442

Le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut désormais agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ! C’est ce qui résulte d’un arrêt récent de l’assemblée plénière de la Cour de cassation, lequel constitue une évolution majeure s’agissant de la réparation du préjudice d’anxiété (autrement dit du préjudice moral découlant d'une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclarer à tout moment une maladie liée à une exposition à l'amiante).

Jusqu’à présent, la Cour de cassation excluait du bénéfice de la réparation les salariés exposés à l’amiante n’ayant pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 précité et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante. C’est donc sur ce principe qu’est revenue la haute juridiction le 5 avril dernier, en soulignant « que de nombreux salariés, qui ne remplissent pas les conditions prévues par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ou dont l’employeur n’est pas inscrit sur la liste fixée par arrêté 5 643 ministériel, ont pu être exposés à l’inhalation de poussières d’amiante dans des conditions de nature à compromettre gravement leur santé ; Que dans ces circonstances, il y a lieu d’admettre, en application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, que le salarié qui justifie d’une exposition à l’amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n’aurait pas travaillé dans l’un des établissements mentionnés à l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998 modifiée ».

La Cour précise que l’employeur ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs lorsqu’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail. Dès lors, le seul fait que les salariés ont été exposés à l’amiante ne peut conduire à considérer que l’employeur a automatiquement manqué à son obligation de sécurité.

Par ailleurs, l’assemblée plénière indique que la reconnaissance et l’évaluation du préjudice d’anxiété ne peuvent reposer sur des motifs généraux, sans caractérisation du préjudice personnellement subi par le salarié, résultant du risque élevé de développer une pathologie grave.

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