Crim. 13 avr. 2022, n° 21-80.653

En cas de fusion-absorption, la responsabilité pénale de la société absorbante peut être engagée s’agissant de faits commis par la société absorbée, y compris antérieurement au 25 novembre 2020, dans l’hypothèse d’une fraude. C’est ce que confirme la Cour de cassation, qui impose aux juges du fond de rechercher si une telle fraude a été commise.

Un homme avait ici porté plainte avec constitution de partie civile, en novembre 2014, du chef de recel d’abus de biens sociaux. Les faits auraient été commis par une société à l’occasion d’une opération de promotion immobilière qui s’était déroulée à compter de 1991. Et cette société a fait l’objet d’une fusion ayant consisté en une dissolution sans liquidation et un transfert universel de ses actifs et passifs au profit d’une autre société, actionnaire unique de la société absorbée, le 5 décembre 2005.

Or, par un revirement de jurisprudence intervenu le 25 novembre 2020, la Cour de cassation, tout en reconnaissant la possibilité, en cas de fusion-absorption d’une société par une autre société entrant dans le champ de la directive 2011/35/UE du 5 avril 2011 (relative aux fusions internes de sociétés anonymes), de condamner pénalement la société absorbante à une peine d’amende ou de confiscation pour des faits constitutifs d’une infraction commise par la société absorbée avant l’opération, réservait cette hypothèse aux opérations de fusions-absorptions réalisées à compter de son prononcé. Une exception était cependant posée par ce même arrêt, à savoir que la société absorbante peut être condamnée pénalement pour des faits constitutifs d’une infraction commise par la société absorbée avant l’opération de fusion-absorption lorsque cette opération, quelle que soit sa date et quelle que soit la nature des sociétés concernées, a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale et qu’elle constitue ainsi une fraude à la loi. Dans ce cas, toute peine encourue peut être prononcée.

Aussi la chambre criminelle casse-t-elle, dans l’affaire ici jugée, l’arrêt d’appel qui avait confirmé le non-lieu. Elle reproche à la chambre de l’instruction de ne pas avoir recherché si l’opération de fusion-absorption ne constituait pas une fraude. Elle ajoute que les juges doivent procéder d’office à cette vérification, érigeant par là même la fraude, en matière de fusion-absorption, en moyen d’ordre public.

Auteur : Éditions Dalloz – Tous droits réservés.