Com. 17 mars 2015, F-P+B, n° 14-11.630

La commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers a, le 5 juin 2013, prononcé une sanction pécuniaire à l’encontre de deux dirigeants de société pour divers manquements (défaut de déclaration de franchissement de seuil, en particulier) et ordonné la publication de sa décision. Ces derniers ont alors formé un recours et demandé au premier président de la cour d’appel de Paris, à titre principal, qu’il soit sursis à l’exécution de cette décision et, subsidiairement, à celle de la mesure de publication dont elle était assortie.

Selon le premier alinéa de l’article L. 621-30 du code monétaire et financier, les recours contre les décisions des sanctions de l’AMF n’ont, en principe, pas un caractère suspensif, à moins que le juge d’appel n’en décide autrement. Dans ce cas, ajoute le texte, « la juridiction saisie peut ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la décision contestée si celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement excessives ». En l’occurrence, la demande de sursis à exécution est rejetée, le délégué du premier président ayant retenu, dans son ordonnance, que les conséquences manifestement excessives alléguées doivent être appréciées in concreto, dès lors que, pour être retenues, elles doivent être irréversibles. La cassation est prononcée pour violation de l’article L. 621-30 du code monétaire et financier : « en subordonnant ainsi la reconnaissance de l’existence de conséquences manifestement excessives à la constatation du caractère irréversible de la situation invoquée, le délégué du premier président, qui devait seulement rechercher si la décision de la commission des sanctions était susceptible d’entraîner de telles conséquences, a ajouté à la loi des conditions qu’elle ne comporte pas et violé le texte susvisé ». En pratique, et comme l’a déjà jugé la Cour de cassation, les conséquences sur la situation patrimoniale du requérant sont susceptibles de justifier le prononcé du sursis à exécution, si la sanction financière prononcée est importante.

La demande subsidiaire avait également été rejetée, le délégué du premier président ayant retenu, pour justifier ce rejet, que, si l’article L. 621-15, V, du code monétaire et financier confère à la commission des sanctions une possibilité d’appréciation des conséquences de la publication d’une sanction, il ne donne pas pour autant à la juridiction du premier président le pouvoir de réserver un sort différent à l’exécution provisoire de cette publication de celui de la sanction. Là encore, la cassation intervient, toujours au visa de l’article L. 621-30 du même code : « en statuant ainsi, alors qu’il entre dans les pouvoirs du premier président de suspendre l’exécution de la seule mesure de publication de la décision contestée si celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement excessives, le délégué du premier président a violé le texte susvisé ». L’idée est que la décision de sanction et la publication de celle-ci obéissent à un régime distinct. Ce n’est pas parce que, pour la décision de sanction, la demande de sursis à exécution a été rejetée, qu’il doit nécessairement en être de même de la mesure de publication.

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