Civ. 3e, 12 sept. 2012, FS-P+B, n° 11-17.948

Le cautionnement même accordé par le consentement unanime des associés n’est pas valide s’il est contraire à l’intérêt social.

La troisième chambre civile de la Cour de cassation s’aligne à quelques nuances sémantiques près sur la solution énoncée dernièrement par un arrêt non publié mais largement commenté (et diversement apprécié) de la chambre commerciale, laquelle avait affirmé : « La sûreté donnée par une société doit, pour être valable, non seulement résulter du consentement unanime des associés, mais également être conforme à son intérêt social ».

Pour l’essentiel, on le voit, il s’agit de la réaffirmation, à propos des cautionnements ou garanties au bénéfice d’un tiers ou d’un associé, qui n’entrent normalement pas dans l’objet social des sociétés civiles (ni des sociétés en nom collectif), de la condition primordiale de conformité de l’opération à l’intérêt social ou, du moins, de défaut de contrariété à celui-ci (la nuance doit être soulignée), et cela même si le cautionnement (en l’espèce) a été accordé avec l’accord unanime des associés.

Et l’on retrouve alors, dans le présent arrêt, comme mesure de cette condition, le critère déjà à l’œuvre dans les précédentes décisions de la mise en cause de « l’existence même » de la société compte tenu de l’importance du bien engagé, en pratique généralement l’immeuble constituant le seul actif social, notamment dans les sociétés civiles immobilières (SCI).

Tel était bien le cas ici, la cour d’appel se voyant reprocher de n’avoir pas recherché, ainsi qu’il lui était demandé, « si la garantie consentie par la SCI n’était pas contraire à son intérêt social, dès lors que la valeur de son unique bien immobilier évaluée à 133 000 € était inférieure au montant de son engagement et qu’en cas de mise en jeu de la garantie, son entier patrimoine devrait être réalisé, ce qui était de nature à compromettre son existence même ». Tout en pouvant apparaître complémentaire, cette jurisprudence diffère un peu de celle empruntée par la première chambre civile, certainement plus respectueuse de l’autonomie de la volonté des associés, qui recourt à la théorie de la communauté d’intérêts afin de valider des cautionnements fournis par une société à risque illimité au-delà de son objet social, en conformité là aussi à son intérêt social, mais en l’absence d’autorisation à l’unanimité des associés.

Auteur : Éditions Dalloz - Tous droits réservés.