Com. 19 févr. 2013, FS-P+B+R+I, n° 11-21.763 

S’agissant d’un gage portant sur des éléments visés à l’article L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont l’une est un établissement de crédit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession. 

En consacrant l’exclusivité du gage des stocks dans son domaine d’application, cette décision de la chambre commerciale du 19 février 2013 répond à une question simple qu’avait posée la doctrine au lendemain de l’importante réforme du droit des sûretés opérée par l’ordonnance no 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés. Peut-on choisir entre gage des stocks et gage de droit commun alors que la situation relève du domaine spécifique du premier ? Non, selon la Cour de cassation.

L’ordonnance de 2006 avait créé un gage de type nouveau : le gage des stocks, dont les dispositions ont été intégrées au code de commerce, aux articles L. 527-1 et suivants du code de commerce. En effet, le droit des sûretés réelles mobilières est ainsi fait qu’à chaque catégorie de biens semble correspondre une forme de garantie. La méthode a naturellement ses avantages, notamment parce qu’elle permet la mise en place d’un régime plus fin, tenant compte de la spécificité de l’assiette de la garantie. Mais elle a aussi ses défauts, plus spécifiquement quand le statut spécial n’ajoute pas grand-chose au droit commun.

Et c’est bien tout le problème du gage des stocks. Ce régime a été critiqué dès son adoption, et il faut relever qu’il ne faisait pas partie des préconisations de la commission Grimaldi et l’on comprend l’envie de la pratique de ne pas y recourir. De plus, compte tenu de sa nouvelle configuration, le gage sans dépossession du code civil est susceptible de comprendre l’éventualité d’un gage des stocks ou de marchandises. Aussi, une interrogation est née en doctrine : dès lors que les parties se trouvent dans le domaine d’application du gage des stocks de l’article L. 527-1, celles-ci doivent-elles impérativement y recourir ? L’application de ce statut spécial s’impose-t-elle, interdisant tout recours au droit commun du gage ? Les enjeux de la réponse sont importants et, en l’espèce, les parties avaient souhaité recourir au gage de droit commun afin de profiter de la possibilité de prévoir un pacte commissoire, ce que ne permet pas le droit spécial du gage des stocks.

La Cour de cassation apporte dans cet arrêt, à rebours de la cour d’appel de Paris, une réponse qui a le mérite de la clarté : « S’agissant d’un gage portant sur des éléments visés à l’article L. 527-3 du code de commerce, les parties, dont l’une est un établissement de crédit, ne peuvent soumettre leur contrat au droit commun du gage de meubles sans dépossession ». En d’autres termes, l’exclusivité du gage des stocks est consacrée. Si l’on est dans son domaine, celui-ci doit s’appliquer et le recours au droit commun du gage n’est pas possible.

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