Com. 31 mai 2016, FS-P+B+R+I, n° 13-25.509

Cet arrêt se rattache, semble-t-il, à une configuration inédite en jurisprudence : la contestation de la mise en œuvre d’une garantie à première demande par le donneur d’ordre, celui-ci estimant indu le montant versé par le garant à la demande du bénéficiaire - objet d’une procédure collective - et au profit de celui-ci.

Les faits sont les suivants : la société Los Comaills a, par acte du 30 avril 2008, cédé à la société Casetti les parts qu’elle détenait dans le capital de la société Teralis, cette cession étant assortie d’une garantie de passif et, pour l’exécution de celle-ci, d’une garantie autonome à première demande consentie par une banque. La société Casetti a, le 15 octobre 2009, mis en œuvre la garantie de passif et, le même jour, appelé la garantie autonome à première demande. En exécution de celle-ci, la banque a payé la somme de 100 000 €, qu’elle a débitée du compte de la société Los Comaills. La société Casetti a été mise en redressement judiciaire le 19 octobre 2010. Estimant que l’appel de la garantie autonome à première demande était injustifié, la société Los Comaills a déclaré au passif de la procédure collective de la société Casetti une créance égale à la somme versée par la banque, qui a été admise à titre chirographaire. La société Casetti a fait l’objet, le 25 octobre 2011, d’un plan de redressement par voie de continuation. La cour d’appel de Toulouse, a confirmé l’admission de créance de la société Los Comaills à concurrence de 100 000 € et à titre chirographaire, ce que conteste le commissaire à l’exécution du plan, qui se pourvoit alors en cassation. Il estime, en substance, que le prétendu créancier n’a pas établi l’existence de sa créance.

Son pourvoi est rejeté. Pour la Cour de cassation, « si, après la mise en œuvre d’une garantie à première demande, le donneur d’ordre réclame au bénéficiaire de celle-ci le montant versé par le garant qu’il estime ne pas être dû, ce litige, eu égard à l’autonomie de la garantie à première demande, ne porte que sur l’exécution ou l’inexécution des obligations nées du contrat de base, de sorte qu’il incombe à chaque partie à ce contrat de prouver cette exécution ou inexécution conformément aux règles de preuve du droit commun ».

La haute juridiction note qu’en l’espèce, « après avoir relevé que la société Casetti s’était estimée fondée à mettre en œuvre la garantie bancaire autonome sur la constatation d’irrégularités et d’anomalies affectant les comptes de l’exercice 2007 de la société Teralis, l’arrêt [d’appel] retient que la société Casetti n’a justifié de ses allégations auprès de la société Los Comaills que par une lettre de son avocat se bornant à faire état, sur une page et très succinctement, des “nombreuses irrégularités entachant plus particulièrement les comptes clients et fournisseurs stipulés dans le bilan 2007”, ayant eu une incidence négative de 102 635,13 € sur le résultat de l’exercice clos le 30 juin 2009, aucune précision n’ayant pu être obtenue par la société Los Comaills sur les anomalies invoquées, pas plus que sur des éléments comptables ». La Cour en déduit « qu’en l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel, qui n’avait pas à s’expliquer sur l’élément de preuve qu’elle décidait d’écarter, a pu retenir que la créance déclarée par la société Los Comaills au passif du redressement judiciaire de la société Casetti était justifiée et devait être admise ». 

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