Com. 22 sept. 2015, FS-P+B, n° 14-22.913

Com. 29 sept. 2015, FS-P+B, n° 13-24.568

Dans ses arrêts des 22 et 29 septembre 2015, la Cour de cassation revient sur l’appréciation de la proportionnalité des cautionnements, notamment en cas de pluralité de cautions solidaires.

Dans la première décision, la chambre commerciale rappelle que la proportionnalité de l’engagement de la caution ne saurait être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie. Cela étant, l’appréciation doit se faire en fonction de tous les éléments du patrimoine de la caution et pas seulement de ses revenus, si bien que, en l’espèce, la cour d’appel ne pouvait rejeter la demande en paiement de la banque sans répondre aux conclusions de celle-ci qui se prévalait de la détention par la caution de diverses participations dans des sociétés.

Quant au second arrêt, il rappelle que la disproportion doit être appréciée au regard de l’endettement global de la caution au moment où le cautionnement a été souscrit, y compris celui résultant d’engagements de caution antérieurs. Fort logiquement, en revanche, les engagements postérieurs ne sauraient être pris en compte.

Dans cette seconde décision, la Cour attire également l’attention des avocats quant au soin à apporter à la rédaction de leurs conclusions en présence de plusieurs cautions solidaires. En principe, lorsque plusieurs cautions se sont engagées solidairement, simultanément et par un même acte à garantir ensemble la dette du débiteur dans la limite d’un certain montant, elles sont réputées ne devoir ensemble que cette somme et non chacune ladite somme. Naturellement, il peut résulter des clauses de l’acte ou des circonstances de l’espèce que chacune des cautions, au contraire, s’est engagée à hauteur du montant indiqué. Lorsque les cautionnements ont été constatés dans des actes distincts, les engagements s’additionneront souvent. Mais, là encore, tout dépend des termes employés et des circonstances.

Ici, deux concubins, le même jour, s’étaient portés cautions solidaires du remboursement de plusieurs prêts, dont un de 480 000 € mais à concurrence chacun de 312 000 €. La cour d’appel, qui a pris en compte l’engagement total du couple, soit 624 000 € (312 000 x 2), a considéré que leur engagement était disproportionné. C’est précisément ce que lui reproche la banque. Toutefois, ses conclusions sont plutôt maladroites et la Cour de cassation ne manque pas de souligner leur ambivalence : « s’étant elle-même placée, par des conclusions ambiguës, dans l’hypothèse où chaque caution garantirait, indépendamment de l’autre, la somme de 312 000 €, la banque ne peut utilement reprocher à l’arrêt d’avoir, en retenant un cumul possible des engagements, dénaturé les actes de cautionnement du 6 juillet 2007 ». En d’autres termes, la banque ne pouvait prétendre que les cautions étaient tenues alternativement et reprocher aux juges d’appel d’avoir pris en considération la somme totale de 624 000 €.

D’une façon générale, le doute profite toujours aux cautions et les banques doivent être particulièrement prudentes. Si, au jour de la souscription des cautionnements, elles ont tendance à vouloir que chaque membre du couple s’engage à payer la somme maximale, pensant ainsi être mieux garanties, elles doivent veiller à ce qu’on ne leur reproche pas ultérieurement une disproportion des engagements. Car, alors, leurs garanties pourraient se révéler inefficaces…

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